De nombreux jeunes LGBT ont encore à faire face à l’homophobie, de la lesbophobie, de la biphobie et à la transphobie (LGBT-phobies) dans les cadres scolaire, social et familial, lors d’activités sportives et de loisirs et sur les réseaux sociaux. Violences verbales et physiques, mises à l’écart, insultes, prédominance de l’hétérosexisme, invisibilité et sentiment d’inadéquation avec la société : l’homophobie et la transphobie ont des conséquences néfastes sur leur santé, leur parcours scolaire et leur parcours de vie. Si elles/ils sont victimes de LGBT-phobie dans le cadre scolaire, elles/ils n’ont pas, ou rarement, la possibilité de se tourner vers leur famille ou leurs ami.e.s pour trouver du soutien, contrairement à la majorité des jeunes victimes de discriminations qui peuvent partager l’expérience de leur discrimination avec leur famille.
Les données des enquêtes Santé Gaie menées par l’association Dialogai et l’Université de Zurich (2002, 2007 et 2011) et de l’enquête « La santé des femmes qui aiment les femmes » de PROFA (2013) montrent que le risque de tentatives de suicide est 2 à 5 fois plus élevé chez les jeunes gays et bisexuels et 2 à 4 fois plus élevé chez les jeunes lesbiennes et bisexuelles que chez les jeunes hétérosexuel.le.s. 75% des tentatives de suicide de ces jeunes se produisent avant qu’ils/elles n’atteignent l’âge de 25 ans ; 50% des jeunes gays, lesbiennes et bisexuel.le.s de moins de 25 ans disent avoir été victimes, au cours des 12 derniers mois, d’au moins une forme de violence (agressions verbales et physiques, harcèlement sexuel).
Les jeunes trans* ont également un risque de tentative de suicide plus élevé que les jeunes hétérosexuel.le.s. Selon l’étude américaine « Suicide Attempts among Transgender and Gender Non-Conforming Adults », publiée en janvier 2014 par l’UCLA Law School et l’American Foundation for Suicide Prevention, 40% à 45% des personnes trans* ont fait au moins une tentative de suicide dans leur vie. Le taux des jeunes trans* faisant une tentative de suicide après avoir subi de la transphobie en milieu scolaire monte à 50% pour ceux qui subissent du harcèlement, 63% pour ceux qui ont subi des agressions physiques, et à 73% pour ceux qui ont subi des agressions sexuelles.
Les manifestations d’homophobie et de transphobie dans l’éducation ont des conséquences graves sur le parcours scolaire des jeunes LGBT: absentéisme, décrochage scolaire, échec scolaire, changement fréquent d’établissement (recherches québécoises). L’orientation sexuelle et affective, supposée ou avérée, est la deuxième cause d’injure et de harcèlement en contexte scolaire. Ainsi, les jeunes LGBT ont plus de risques que les jeunes hétérosexuel.le.s d’évoluer dans un environnement scolaire hostile et instable.
Cependant, les LGBT-phobies n’affectent pas que les jeunes LGBT. Tout.e élève dont l’expression de genre ne se superpose pas aux normes genrées très codifiées ou dont la conduite pourra être perçue comme différente (un garçon jugé trop efféminé qui prend des cours de danse ; une fille jugée trop masculine qui joue au foot) peut être la cible de discriminations LGBT-phobes. Les élèves peuvent aussi grandir dans une famille arc-en-ciel, c’est à dire une famille où au moins l’un des parents se définit comme LGBT. L’identité des jeunes enfants est étroitement liée à celle de leur famille ; c’est donc eux-mêmes/elles-mêmes qui risquent de se percevoir comme « non corrects » s’ils/si elles subissent des propos dénigrant leur famille ou s’ils/si elles subissent de l’homophobie ou de la transphobie par procuration. Les enfants de familles arc-en-ciel découvrent en outre que le modèle familial « père, mère, enfant » prévaut dans les manuels scolaires et la littérature jeunesse alors que leur propre réalité quotidienne n’est guère représentée. Le silence et l’invisibilité a un effet négatif sur ces enfants. Enfin, les élèves peuvent avoir dans leur entourage proche (oncle/tante, cousin/cousine, ami.e, etc.) une personne qui se définit comme LGBT.
Les études internationales et les constats faits à Genève montrent que :
- 69% des élèves LGB ou qui se questionnent ont été la cible d’homophobie, de biphobie ou de lesbophobie en milieu scolaire
- 89% des élèves trans* ont été injurié.e.s à l’école, 55% physiquement harcelé.e.s
- 1/3 des élèves qui se définissent comme hétérosexuel.le.s en ont été la cible également
Les études québécoises et les constats faits à Genève montrent en outre que les professionnel.le.s entourant les élèves interviennent peu, ou pas du tout, par ignorance ou par manque d’outils et de moyens, lorsqu’elles/ils assistent à de la violence homophobe ou transphobe dans leur établissement scolaire. Ils/elles n’ont parfois pas conscience de ces discriminations. Les jeunes ne se sentent ni respecté.e.s ni inclus.e.s à l’école et encore moins en sécurité lorsqu’un.e professionnel.le de l’établissement tolère des manifestations d’homophobie ou de transphobie sans intervenir ou lorsqu’il/elle est la source de ces manifestations.
L’homophobie, la transphobie et l’hétérosexisme et leurs conséquences en milieu scolaire constituent ainsi un réel problème d’égalité d’accès à l’éducation et un problème de santé publique dont il est nécessaire de prendre la mesure et contre lequel il est nécessaire d’agir.
La prévention de l’homophobie, de la lesbophobie, de la biphobie et de la transphobie s’inscrit dans un contexte plus général de lutte contre les discriminations, d’apprentissage du mieux vivre-ensemble et d’éducation citoyenne. En effet, aménager un climat d’éducation et un quotidien exempts d’homophobie, de transphobie et d’hétérosexisme avec l’aide de toutes les actrices et acteurs du monde de l’éducation, est bénéfique pour l’ensemble des élèves, indépendamment de leur orientation sexuelle, de leur identité de genre ou de leur structure familiale.